Nicolas ANELKA face à Raymond DOMENECH au moment où il tenait ses propos d'injures.

Nicolas ANELKA face à Raymond DOMENECH au moment où il tenait ses propos d'injures.

Les matchs contre l'Uruguay et le Mexique

À quelques jours du premier match d'ouverture contre l'Uruguay, le climat est de plus en plus tendu dans le groupe des Bleus. Alors que certains joueurs refusent de se rendre en conférence de presse, Raymond Domenech relate le manque d'investissement et les états d'âme de ses joueurs lors des entraînements et les mises en place en particulier. D'ailleurs, la presse révèle déjà quelques frictions comme Florent Malouda qui refuse de jouer milieu défensif et aurait taclé violemment Mathieu Valbuena. Malgré toutes ces dispersions, le capitaine Patrice Évra tente de remobiliser ses troupes la veille du match.

Le 11 juin, au Cap, l'équipe de France fait son entrée en Coupe du monde par un match nul face à l'Uruguay (0-0).

La période entre les deux matchs est marquée par le débat tactique auquel est confronté Raymond Domenech. Dans Tout seul, ce dernier confie qu'il ne parvient plus à remettre Anelka dans sa position de pointe et que les autres joueurs ne parviennent pas à s'accorder avec Yoann Gourcuff dans le jeu. Thierry Henry, devenu remplaçant, ne se sent plus vraiment concerné. Lassé, Domenech inscrit dans son journal de bord : « J'en eus plein le dos de leurs jérémiades ». En outre, le troisième gardien Cédric Carrasso est obligé de déclarer forfait pour une blessure à la cuisse gauche. Il est alors remplacé par Stéphane Ruffier, gardien de l'AS Monaco.

Le deuxième match face au Mexique, le 17 juin, à Polokwane, est un échec pour l'équipe de France. Alors qu'Éric Abidal a mal joué le hors-jeu sur le but d'Hernández, il est également à l'origine de la faute qui entraîne le penalty transformé par les Mexicains. Les Bleus s'inclinent 2-0 face à la formation mexicaine et sont quasiment éliminés de la Coupe du monde.

 

Les faits

Anelka insulte Domenech

Au cours de la mi-temps du match France-Mexique, Raymond Domenech, très agacé par la première période de ses joueurs, demande à Nicolas Anelka d'effectuer plus d'appels en profondeur et de cesser de « décrocher », l'international tricolore exprime son désaccord envers son sélectionneur et finit par lui adresser son mécontentement par une phrase insultante dans les vestiaires en le tutoyant. Objets de débats, les vrais mots d'Anelka varient selon les sources même si celle de Domenech paraît la plus probable, ce dernier précisant qu'il n'a « pas entendu la phrase telle qu'elle a été imprimée à la Une de L'Équipe. ». Cette incertitude s'explique par le fait que Raymond Domenech était seul face aux joueurs et qu'aucun membre de l'encadrement n'était présent dans le vestiaire à ce moment-là.

  • « Enculé, t'as qu'à la faire tout seul ton équipe de merde ! J'arrête, moi... » selon Raymond Domenech (Tout seul).
  • « Va te faire enculer, sale fils de pute » selon la Une de L’Équipe le 19 juin 2010.
  • « T'as raison, va te faire enculer, toi et ton système de jeu ! Sale fils de pute ! » selon Bruno Godard (La décennie décadente du football français)
  • « Va te faire enculer avec ton équipe. Fais l'équipe que tu veux ! » selon le Parisien
La Une du journal L'Équipe

Le lendemain de la rencontre, l'encadrement évoque la décision d'exclure Nicolas Anelka tout en sachant que la Coupe du monde est déjà presque terminée pour les Français. Une avalanche de critiques s'abat sur les Bleus à la suite de la défaite contre le Mexique. Cependant, la révélation de la dispute entre le sélectionneur et Anelka va changer considérablement la donne. En effet, Anelka puis l'encadrement sont prévenus dans la nuit du 18 au 19 juin que l'altercation se retrouvera dans L'Équipe le lendemain. Le 19 juin, le quotidien sportif français publie en première page l'image sombre de Raymond Domenech et de Nicolas Anelka, en inscrivant en gros titre : « Va te faire enculer, sale fils de pute », propos prêtés au joueur4.

Dans l'après-midi, Jean-Louis Valentin (directeur délégué de la Fédération), Jean-Pierre Escalettes et Patrice Évra se rendent en conférence de presse. Tandis que le président de la FFF tente de minimiser l'incident, Patrice Évra déclare alors : « Mais le problème de l'équipe de France, ce n'est pas Anelka, c'est le traître qui est parmi nous, il faut le dire. Comment cette chose a pu sortir dans la presse ? Il n'y a que nous, les joueurs et le staff, qui savions. C'est ce traître qu'il faut éliminer du groupe. », citation restée dans les annales et qui lui sera vivement reprochée par la suite. En effet, à la suite de cette publication polémique du journal L'Équipe, les joueurs de l'équipe de France cherchent à connaître l'identité de celui qui a parlé à un membre extérieur de l'équipe de France de l'altercation entre Domenech et Anelka, qu'ils surnomment « la taupe ». Cet intérêt pour retrouver « la taupe » plutôt que de se concentrer sur le dernier match provoque la consternation des observateurs5.

Devenu très médiatique, cet épisode extra-sportif a des conséquences directes sur la gestion du groupe en interne. Prévenu, le président de la Fédération française de football, Jean-Pierre Escalettes, affirme qu'« il faut le renvoyer chez lui, pour le futur, pour l'image et pour l'exemple ». Peu après, à la demande du capitaine Patrice Évra, Domenech et Escalettes acceptent de garder Nicolas Anelka à condition qu'il s’excuse « publiquement, devant le staff et l'équipe ». Devant le refus de ce dernier de s'excuser publiquement même s'il avait engagé une démarche avec le sélectionneur, la FFF publie un communiqué en début de soirée qui annonce le renvoi du joueur de Chelsea.

Peu avant son départ, Nicolas Anelka a l'autorisation de rester pour le repas avec ses coéquipiers. Lors d'une réunion improvisée, l'ensemble des joueurs se réunissent une dernière fois. Tandis que quelques applaudissements sont entendus, il semblerait que c'est lors de ce conciliabule que l'idée de faire grève en soutien à Nicolas Anelka aurait germé. Le joueur de Chelsea reprend l'avion quelques heures plus tard à destination de Londres.

Journée du 20 juin 2010
Franck Ribéry s'invite dans Téléfoot

Le matin du 20 juin, TF1 anime en direct depuis Knysna son émission dominicale dédiée au football, Téléfoot. L'émission recevait Raymond Domenech pour essentiellement parler de la déroute des joueurs français face au Mexique et de l'exclusion de Nicolas Anelka à la suite des propos relatés par le journal L'Équipe. C'est alors qu'en milieu d'émission, de manière totalement imprévue, Franck Ribérydécide de rejoindre le plateau de l'émission en short, claquettes et socquettes blanches. Très ému, il fait part du mal-être au sein de l'équipe, parlant clairement d'une souffrance, et s'excuse devant les Français de ne pas avoir mouillé le maillot lors des matchs comme ils auraient dû. Il en profite également pour démentir des rumeurs concernant une altercation entre lui et Yoann Gourcuff, et rejoint les propos de Patrice Évra concernant la taupe : selon lui, cette affaire n'aurait dû rester qu'un simple fait de vestiaire. Il promet cependant de faire son maximum afin que l'équipe de France, malgré les mauvais résultats, parvienne à se qualifier pour les huitièmes de finale en s'imposant face à l'Afrique du Sud6.

Ces excuses sont vite relayées par la presse mais elles perdront vite leur crédibilité au vu de la grève qui se préparait déjà au sein de l'équipe, à l’initiative des cadres, Ribéry et Evra en tête7, et qui éclatera quelques heures après l'émission.

La grève du bus

Alors qu'ils se rendaient à l'entraînement, les joueurs refusent de s'entraîner en soutien à l'attaquant français, exclu du groupe. Après avoir salué les supporters présents au Field of Dreams (le nom du stade), les Bleus refusent de participer à l'entraînement et remontent dans leur bus. Cette décision provoque la colère du préparateur physique Robert Duverne, qui a alors une altercation avec le capitainedes Tricolores, Patrice Évra. Les deux hommes finissent par être séparés par Raymond Domenech. Cet épisode reste marqué par l'image de Robert Duverne, jetant son chronomètre au sol, excédé par le comportement des joueurs8.

En compagnie d'Évra, remonté dans le bus, les joueurs de l'équipe de France vont pendant près d'une demi-heure s'entretenir à l'écart des membres de l'encadrement technique, restés sur la pelouse. Raymond Domenech sort finalement du bus pour lire devant les médias présents un communiqué de presse des joueurs expliquant les raisons de cette mutinerie : « Par ce communiqué, tous les joueurs de l’équipe de France, sans exception, souhaitent affirmer leur opposition à la décision prise par la Fédération française d’exclure Nicolas Anelka »9.

Face à cette situation inédite, Jean-Louis Valentin, le directeur délégué de la FFF, annonce vouloir présenter sa démission et quitter l'Afrique du Sud pour rentrer à Paris. À la suite de la lecture du communiqué expliquant le refus de s'entraîner, les joueurs, restés dans le bus, repartent en direction de leur hôtel, sans Robert Duverne10.

D'après Patrice Evra, les Bleus envisageaient initialement de faire grève pour le match contre l'Afrique du Sud, et c'est lui qui aurait convaincu ses coéquipiers d'y renoncer pour, à la place, faire une grève de l'entrainement11.

Jours suivants et élimination

Le 22 juin 2010, les Bleus jouent leur dernier match de la Coupe du monde contre l'Afrique du Sud. Au vu des scores du Groupe A, la France était quasiment éliminée, car elle devait absolument gagner avec 4 buts d'écart (si l'Uruguay gagne) ou 5 (si le Mexique gagne). En effet, un match nul entre l'Uruguay et le Mexique les qualifierait tous les deux.

Après que son équipe a encaissé deux buts, Florent Malouda inscrit l'unique but des Bleus dans cette Coupe du monde à la 70e minute. La France est donc éliminée sur le score final de 2 buts à 1 pour l'Afrique du Sud. La fin du match prend une tout autre tournure puisque Raymond Domenech refuse de serrer la main du sélectionneur de l'Afrique du Sud, Carlos Alberto Parreira qui avait déclaré que l'équipe de France ne méritait pas de participer à la Coupe du monde à la suite de la main de Thierry Henry.

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